17/09/14

La régionalisation de la loi Ikea

Lors de l’entrée en vigueur de la Directive services en 2006, la loi belge du 13 août 2004 relative à l’autorisation d’implantations commerciales (ci-après “loi Ikea”) fut remise en question étant donné que les critères qu’elle imposait pour délivrer les permis ne respectaient pas cette nouvelle directive

La prise en compte des répercussions sur le commerce existant était en effet a priori contraire à l’interdiction d’un test économique à finalité économique portée par la directive.

Le législateur fédéral a réagi en adoptant la loi modificatrice du 22 décembre 2009 qui remplace trois des quatre critères prévus par la loi Ikea. Ces nouveaux critères sont compatibles avec la Directive en ce qu’ils ne constituent plus un test économique mais sont des exigences objectivement justifiées par des raisons impérieuses d’intérêt général. L’analyse ne porte plus sur les répercussions dans le commerce mais sur la protection de l’environnement urbain.

Dans le cadre de la 6ème réforme de l’Etat, la loi Ikea a été transférée aux Régions. Chaque Région va pouvoir déterminer elle-même sa politique commerciale.



1. Les législations régionales concernant les implantations commerciales

A l’heure actuelle, seule la Région de Bruxelles-Capital a adapté sa législation.

  • A Bruxelles, le Code de l’aménagement du Territoire (ci-après “CoBAT”) a été modifié par l’ordonnance du 8 mai 2014 et la loi Ikea est abrogée depuis le 1er juillet 2014.


Il n’est donc plus requis d’obtenir un permis socio-économique et un permis d’urbanisme. Dorénavant, une seule demande de permis d’urbanisme est nécessaire.

Le nouvel article 4/2 du CoBAT prévoit  que les autorités doivent réserver “une attention particulière aux répercussions des projets d'implantation commerciale d'une surface commerciale nette supérieure à 400 mètres carrés, notamment quant à la protection des consommateurs, à la sécurité, à la salubrité des lieux et des abords, aux conditions de circulation, d'accessibilité et de stationnement, ainsi qu'à l'intégration de tels projets dans leur environnement urbanistique”.

Ces critères sont compatibles avec la Directive services. Quant à l’autorité en charge de la délivrance du permis, les communes sont compétentes pour les surfaces inférieures à 1000 m². Au delà, la Région est compétente.

  • En Région Wallonne, l’adoption du Décret a été reportée par le gouvernement sortant. Il devrait normalement être adopté dans les prochaines semaines.


Selon le projet de décret, l’autorité compétente devra se baser sur 4 critères: la protection du consommateur, la protection de l'environnement urbain, les objectifs de politique sociale et la contribution à une mobilité plus durable.

  • En Région flamande, le gouvernement a marqué son accord sur un avant-projet de décret sur la politique intégrale en matière d’implantations commerciales. Le décret ne devrait toutefois pas entrer en vigueur avant la fin de l’année 2014.


En attendant, la loi Ikea est toujours applicable.

Si l’on peut se réjouir de l’instauration d’un permis unique, des craintes sont en revanche permises quant au respect de la Directive services. En effet, les communes pourront imposer des restrictions d’assortiment aux magasins. Bien que l’on ne connaisse pas leur réelle marge de manoeuvre, il conviendra d’éviter de laisser la possibilité aux communes de se baser sur des critères économiques lorsqu’elles prennent une décision qui restreint l’accès au marché des services. En effet, la question se pose si elles pourront décider de limiter l'ouverture de magasins de vêtements et chaussures au centre-ville, ou stipuler qu'un commerçant vendant de la literie ne pourra plus vendre d'autres meubles.

2. Conclusion

La régionalisation de la loi Ikea a donc l’avantage de mettre fin au chevauchement des compétences fédérales et régionales en matière d’implantations commerciales.

Les Régions ont donc la liberté de prendre les règles qu’elles jugent adéquates pour mener leur politique en matière de commerce de détail et de distribution. Quant au respect de la Directive services, les critères utilisés paraissent compatibles.

Les seules réserves concernent l’avant-décret flamand à propos duquel il faudra attendre plus de précisions sur le rôle des communes.

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