30/05/23

La protection contre les mesures préjudiciables : nouvelles règles dès le 1er juin 2023

Une nouvelle règlementation modifiant la protection contre les représailles en matière de discrimination et de violence, de harcèlement moral ou sexuel au travail a été publiée au moniteur belge du 15 mai dernier. Il s'agit d'une loi et d'un arrêté royal qui modifient les trois lois « anti-discrimination », la loi relative au bien-être au travail en ce qui concerne la protection contre les mesures préjudiciables dans le cadre de violence au travail ou de harcèlement moral ou sexuel au travail et le titre 3 du livre I du Code sur le bien-être au travail, concernant l’information de l’employeur relative à la protection contre les mesures préjudiciables dans le cadre de la procédure interne. Ces modifications s’imposaient pour se conformer aux directives européennes en la matière.  

Contexte

Jusqu’à présent, une victime de violence au travail ou de harcèlement moral ou sexuel au travail pouvait faire appel à la procédure interne de l’entreprise, réclamer le respect de ses droits devant les tribunaux au moyen d’actions en justice et bénéficier d’une protection contre toute mesure préjudiciable (aussi appelée mesure de représailles) à son encontre sur base de la loi relative au bien-être au travail. En effet, les lois « anti-discrimination » renvoyaient pour les travailleurs et les personnes assimilées, à l’application exclusive de cette loi lorsqu’il s’agit de ces comportements.
Or, par le passé, la Cour de justice de l’Union européenne et la Commission européenne ont relevé que la protection prévue par cette loi contre les mesures préjudiciables était trop restrictive par rapport au droit européen. La modification des quatre lois ci-dessus est issue de ce constat.

Ce qui va changer 

Désormais, les règles qui protègent les travailleurs contre les mesures préjudiciables qui seraient prises par l’employeur, se trouveront dans l’une des trois lois « anti-discrimination » lorsque les faits concernent des faits de violence ou de harcèlement moral au travail liés à un critère de discrimination visé dans la définition de la violence et du harcèlement moral au travail ou lorsqu’il s’agit de harcèlement sexuel au travail.
Les règles de protection contre les mesures préjudiciables deviennent par ailleurs, plus protectrices.

  • Premièrement, la protection contre les mesures préjudiciables est étendue à d’autres catégories de travailleurs. Ainsi, cette protection ne couvre plus uniquement le travailleur qui a déposé une plainte, ou au nom de qui cette plainte a été déposée, et les témoins en justice qui répondent aux conditions déterminées par la loi. Elle couvre à présent :
    • les travailleurs qui interviennent comme témoin au bénéfice de la personne concernée par la violation alléguée. Soulignons que les conditions de forme auxquelles doivent obéir actuellement le témoignage seront désormais supprimées ;
    • les travailleurs qui effectuent un signalement au bénéfice de la personne concernée par la violation alléguée. Il peut donc s’agir d’un simple avertissement déformalisé, en interne, au sujet de la violation alléguée ;
    • les travailleurs qui ont introduit une plainte au bénéfice de la personne concernée par la violation alléguée. Le projet de loi explicite ce que vise la notion de plainte ;
    • les travailleurs qui donnent des conseils ou apportent aide ou assistance à cette personne ;
    • les travailleurs qui invoquent la question de la violation alléguée ;
    • le travailleur au bénéfice duquel les actes ci-dessus sont accomplis.

Pour bénéficier de la protection, le travailleur doit démontrer qu'un signalement a été fait ou qu'une plainte a été introduite ou qu'une action en justice a été intentée. Cette preuve peut être apportée par toute voie de droit.

  • En contrepartie de ces extensions, la loi explicite que la protection ne s’applique pas en cas d’usage abusif des procédures, et qu’un tel abus peut donner lieu au paiement de dommages et intérêts. Ensuite, la loi prévoit que lorsqu’un travailleur est couvert par la protection, l’employeur ne peut prendre aucune mesure préjudiciable à son encontre, sauf pour des raisons qui ne sont pas liées au dépôt ou au contenu du signalement, de la plainte, de l’action en justice ou autre démarche protégée.
  • La loi modifie aussi le début de la période de protection. Cette période ne prend plus cours dès le moment où la plainte est déposée mais dès le moment où l’employeur a eu connaissance du signalement, de la plainte, de l’action en justice ou autre démarche protégée ou a pu raisonnablement en avoir connaissance.
  • Les autres dispositions (les sanctions, la répartition de la charge de la preuve, etc.) insérées dans les lois anti-discrimination restent identiques, dans leur principe, aux règles actuelles.

Logiquement, la nouvelle législation en matière de protection contre les mesures préjudiciables modifie également la loi relative au bien-être au travail pour renvoyer aux nouvelles dispositions des lois « anti-discrimination ». La protection contre les mesures préjudiciables prévue par la loi relative au bien-être au travail ne couvrira plus que la violence au travail ou le harcèlement moral au travail qui n’est pas lié(e) à un des critères de discrimination.

La nouvelle règlementation modifie également la loi relative au bien-être au travail sur d’autres points. Ainsi, de nouveaux critères pouvant notamment faire l’objet de violence au travail et de harcèlement moral au travail ont été ajoutés afin de tenir compte des nouveaux critères protégés introduits dans la Loi Genre. Il s’agit des caractéristiques sexuelles, de la grossesse, l’accouchement, l’allaitement, la maternité, l’adoption, la procréation médicalement assistée, du changement de sexe, de la paternité et la co-maternité.

Point d'attention

 En tant qu’employeur, soyez conscient qu’à l’avenir, tout travailleur qui, de bonne foi, interviendrait comme témoin, introduirait une plainte ou effectuerait un signalement, invoquerait la question de la violation d’une des lois « anti-discrimination », donnerait des conseils ou apporterait une aide ou assistance à une personne victime de violence ou de harcèlement moral au travail liés à un critère de discrimination ou de harcèlement sexuel au travail, est protégé contre toute mesure préjudiciable à son encontre.

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