13/04/18

Le bail commercial de courte durée : la Région Wallonne suit le mouvement

Nous avions fait un état des lieux des révolutions en cours au sein des Régions de notre pays concernant la modification de la sacro-sainte législation sur le bail commercial datant du 30 avril 1951 lors de notre précédent article en novembre 2017 .

L’enjeu fondamental désormais est en effet d’implémenter dans la législation un phénomène économique déjà bien présent dans nos grandes villes et qui répond à un besoin insistant de nombreux acteurs économiques, à savoir la location commerciale de courte durée.

Pour rappel, les cas de figure nécessitant un cadre règlementaire locatif adapté à une courte durée sont nombreux, et les exemples suivants sont classiquement donnés : des enseignes ayant pignon sur rue désireuses de tester un nouveau produit ou dévoiler une nouveauté par une action marketing temporaire, des entrepreneurs qui tentent de lancer un nouveau concept, des détaillants qui doivent liquider un stock de marchandise ou profiter d’une aubaine provisoire bien localisée.

De nombreuses idées ont germé afin de prévoir un cadre sur-mesure répondant à cette nécessité : toutes visent à refonder la législation existante pour permettre de conclure un bail commercial de courte durée de quelques jours à un ou deux ans.

Les cartes ont cependant été rabattues avec la régionalisation des matières locatives en 2014.

Chaque entité fédérée régionale a désormais le pouvoir de modifier la règlementation relative aux baux dans son territoire, sans nécessité d’une quelconque uniformisation des règles sur l’ensemble de la Belgique comme cela était le cas auparavant.

Nous avions examiné il y a quelques mois l’initiative décrétale flamande (Décret flamand du 17 juin 2016, publié au Moniteur belge du 26 juillet 2016), première Région à prévoir un cadre souple réglementé pour les locations commerciales jusqu’à un an.

Du côté des Régions bruxelloise et wallonne, le traitement de cette question n’a pas été estimé aussi prioritaire.

En Région Wallonne, nous avions fait état d’un avant-projet de décret qui avait été présenté en mars 2017 par l’ancien ministre de l’Economie Jean-Claude Marcourt. Les principes prévus dans ce projet étaient relativement similaires à ceux du Décret flamand, avec les particularités intéressantes qu’un délai maximum de deux ans était prévu et que la sous-location était autorisée, afin de permettre le partage du « pop-up store » entre plusieurs entrepreneurs.

Si le changement de majorité a ralenti dans un premier temps le traitement de ce projet au début de l’année 2017, le nouveau gouvernement n’a pas souhaité l’enterrer et les travaux ont pu reprendre pour aboutir à l’adoption d’un Décret wallon le 15 mars 2018 (publié au Moniteur Belge le 28 mars 2018).

Ce Décret reprend la plupart des principes établis dans le précédent projet du Ministre Jean-Claude Marcourt, qui était lui-même fortement inspiré du Décret flamand de 2016, sans toutefois reprendre les particularités qui en faisant sa singularité.

Les règles adoptées sont principalement les suivantes :

  • Le contrat doit être établi par écrit, pour une durée égale ou supérieure à un an.
  • Le bail commercial se termine de plein droit à l’échéance du terme convenu. Une prolongation/reconduction est possible pour autant qu’elle soit formalisée par écrit et que la durée totale du bail commercial n’excède pas un an. Si la location se prolonge plus d’un an, le bail commercial sera réputé dès l’origine être un bail commercial de 9 ans, soumis aux dispositions classiques de la loi du 30 avril 1951.
  • Le locataire peut à tout moment terminer anticipativement le bail commercial à court terme moyennant un préavis d’un mois par lettre recommandée, sans aucune indemnité.
  • Le contrat de bail commercial peut être résilié à tout moment de commun accord entre les parties, moyennant un écrit.
  • Sauf accord des parties, la sous-location et la cession de bail sont interdites.
  • Sauf interdiction expresse écrite dans le bail, le locataire peut effectuer toutes les transformations au bien immobilier afin de l’adapter à son entreprise pour autant que les frais ne dépassent pas un an de location. Deux conditions sont cependant stipulées : (i) la sécurité, la salubrité et l’esthétique ne doivent pas être compromises, et (ii) le bailleur doit en être informé par envoi recommandé avant le début des travaux.
  • En fin de bail, le bailleur peut exiger la suppression des travaux. Si les travaux sont conservés, aucune indemnité n’est due au preneur.

S’il est heureux que la Région Wallonne n’ait pas non plus tardé à prévoir son propre cadre règlementaire, tous les regards sont désormais tournés vers la Région de Bruxelles-Capitale.

Une initiative parlementaire de plusieurs députés de l’opposition a été médiatisée à la fin de l’année 2017.

Cette proposition a été accueillie avec scepticisme par la majorité actuelle au sein du parlement et du gouvernement bruxellois, qui a indiqué préférer le temps de la réflexion et l’analyse des résultats des systèmes mis en place dans les deux grandes Région du pays.

Nous serons donc attentifs à un éventuel débat parlementaire avant les élections du 26 mai 2019. Il est cependant probable que cette question fasse plutôt l’objet de négociations dans le cadre de la constitution de la nouvelle majorité issue de ces élections.

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