17/04/13

Augmenter le taux d’emploi des travailleurs âgés: mythe ou réalité?

La Convention collective de travail n° 104 concernant la mise en œuvre d'un plan pour l'emploi des travailleurs âgés dans l'entreprise, qui est entrée en vigueur le 1er janvier dernier, a pour but de maintenir ou augmenter le nombre de travailleurs âgés de 45 ans et plus dans les entreprises. Outre la charge administrative qu’elle représente, la question se pose de savoir si cette mesure ne demeurera pas lettre morte en pratique.

1.- Dans le cadre de la Stratégie Europe 2020, qui a vocation à stimuler la croissance dans l’Union européenne en visant notamment un taux d’emploi de 75% pour les 20-64 ans, le Gouvernement Di Rupo a notamment imposé aux entreprises de conclure, via la concertation sociale, un plan concret et adapté à leur taille pour le maintien à l'emploi des travailleurs âgés. La Convention collective de travail n° 104 (« CCT 104 ») a donc été adoptée au sein du Conseil National du Travail.

2.- Ainsi, depuis le 1er janvier dernier, conformément à l’article 2 de la CCT 104, toute entreprise occupant, au premier jour de l’année civile, 20 travailleurs ou plus – ce nombre étant calculé en équivalents temps plein, en ce compris les travailleurs intérimaires – doit mettre en place un plan pour l’emploi des travailleurs âgés.

Deux remarques s’imposent d’entrée de jeu à la lecture de cet article.

D’une part, le seuil est fixé pour quatre ans, ce qui implique que pendant les quatre prochaines années à venir, soit l’entreprise est visée par cette obligation, soit elle en est dispensée.

D’autre part, la notion d’ « entreprise » n’est pas définie par la CCT 104, le commentaire de l’article 2 renvoyant tant aux déclarations Dimona – ce qui laisse entendre qu’il faille plutôt se référer à la notion d’employeur/entité juridique – qu’à la loi du 4 août 1996 relative au bien-être des travailleurs lors de l'exécution de leur travail – ce qui laisse entendre que l’on puisse également s’en référer à la notion utilisée pour les élections sociales, à savoir celle d’unité technique d’exploitation –. Il y a donc un manque de clarté juridique à cet égard.

3.- Pour les entreprises avec organe représentatif (un conseil d’entreprise, une délégation syndicale ou un comité pour la prévention et la protection au travail), une procédure d’information et de consultation doit être suivie, impliquant un avis de l’organe représentatif dans les deux mois de la présentation du plan et, le cas échéant, une réponse motivée de l’employeur, dans les deux mois de la réception de l’avis, s’il décide de ne pas suivre ledit avis.

Pour les entreprises sans organe représentatif, une simple information suffit. Nous suggérons à cet égard que l’employeur suive ses procédures habituelles (affichage aux valves, e-mail interne, etc.) tout en se réservant la preuve de cette information.

A l’échéance du plan, l’employeur est tenu d’informer l’organe représentatif ou, à défaut, les travailleurs de l’entreprise, des résultats obtenus. La CCT 104 ne règle ni la question du délai dans lequel l’employeur doit procéder à cette information (si ce n’est que, lorsque le plan contient des mesures pluriannuelles, l’employeur doit fournir une information chaque année sur l’évolution du plan), ni la question du type ou du niveau d’informations à fournir. L’employeur ne se voit imposer aucune obligation de résultat non plus.

4.- La CCT 104 a voulu laisser une large flexibilité aux entreprises. Aussi n’impose-t-elle ni forme (tout au plus le plan doit-il contenir quelques mentions obligatoires) ni contenu spécifiques. Elle se contente de proposer une liste, non-exhaustive, de sept domaines d’action (par exemple, la sélection et l'engagement de nouveaux travailleurs, le développement des compétences et des qualifications des travailleurs, y compris l'accès aux formations, les possibilités d'adapter le temps de travail et les conditions de travail, etc.) dans lesquelles les mesures, adaptées à l’entreprise, peuvent être adoptées pour une ou plusieurs années.

5.- Les sanctions générales pour non-respect des conventions collectives de travail s’applique à l’entreprise qui, atteignant le seuil de 20 travailleurs susmentionné, reste en défaut de mettre en œuvre un plan pour l’emploi des travailleurs âgés. A partir du 1er juillet 2013, il s’agira uniquement d’une sanction administrative de niveau 1 (la sanction pénale étant abrogée à cette date), à savoir de 60 à 600 € (décimes additionnels inclus), éventuellement multipliés par le nombre de travailleurs concernés.

6.- En guise de conclusion, l’on peut souligner la grande flexibilité qui est laissé aux entreprises, tant dans le type de mesures à mettre en œuvre que dans la durée de celles-ci. L’on regrettera toutefois que cette charge administrative est imposée indifféremment à toutes les entreprises concernées, quelle que soit leur taille ou les moyens dont elles disposent, de la PME au groupe international. L’on se posera enfin la question de savoir si la CCT 104 aura un quelconque effet en pratique puisque, à défaut d’obligation de résultat et compte tenu des sanctions relativement faibles, seuls les employeurs au sein desquels une véritable réflexion et politique pour l’emploi des travailleurs âgés sera menée obtiendront à notre sens les résultats escomptés.

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