Korean Airlines a notifié le 13 janvier 2023 son projet de rachat de Asiana Airlines à la Commission européenne. Le 17 février 2023, la Commission a ouvert une enquête approfondie sur ce projet en raison du risque de restriction de la concurrence sur les marchés des services de transport aérien de passagers et de marchandises entre l'EEE et la Corée du Sud. Le 17 mai 2023, elle a adressé une communication des griefs à Korean Air dans le cadre de ce dossier.
Korean Air a procédé à diverses notifications aux nombreuses autorités de la concurrence compétentes en matière de contrôle des concentrations. Onze pays (Chine, Australie, Malaisie, Philippines, Corée du Sud, Singapour, Vietnam, Taïwan, Thaïlande, Royaume-Uni, Turquie) ont ainsi approuvé ce projet d’acquisition avec ou sans conditions.
La compagnie aérienne a également notifié le 13 janvier 2023 son projet de rachat à la Commission européenne afin d’obtenir son approbation dans le cadre de son contrôle des concentrations.
Dans ce cadre, la Commission a lancé une enquête afin d’étudier les conséquences de ce rachat sur les marchés concernés. Elle a ainsi examiné les documents internes des entreprises concernées et recueilli les observations des compagnies aériennes concurrentes de même que les concurrents potentiels.
A l’issue de cette enquête préliminaire, la Commission a décidé 17 février 2023 a pris la décision d’ouvrir une enquête approfondie sur cette acquisition en raison du risque de restriction de la concurrence sur les marchés des services de transport aérien de passagers et de marchandises entre l'EEE et la Corée du Sud.
En effet, les deux opérateurs sont les compagnies les plus importantes de Corée du Sud. Korean et Asiana Air étaient classées respectivement 19eme et 29eme compagnies mondiales par IATA, avant la crise sanitaire. Ce sont des concurrentes directes sur le marché du transport aérien de passagers et de fret entre la Corée du Sud et l’Espace Economique Européen (EEE). Elles exploitent des liaisons asiatiques ainsi que des liaisons long-courrier entre la Corée du sud et le reste du monde.
Relevons que l’analyse de la Commission européenne s’effectue au regard de la puissance de marché des compagnies liaison par liaison.
En l’espèce, Korean et Asiana Airlines exploitent toutes les deux des liaisons de transport de passagers entre la Corée du Sud et l’EEE, notamment vers Heathrow, Paris Roissy, Rome et Francfort. Selon la Commission européenne, cette concentration pourrait donc conduire à éliminer la concurrence sur ces quatre liaisons. Une telle opération serait susceptible d’entraîner une augmentation des prix et/ou une diminution de la qualité des services de transport de passagers sur ces lignes.
En outre, la Commission relève que l’opération pourrait réduire la concurrence dans la fourniture de services de transports de fret entre l’Europe et la Corée du Sud, car les concurrents du futur groupe se heurteraient à des barrières à l’entrée notamment règlementaires pour développer leurs activités et seraient en incapacité d’exercer une pression concurrentielle suffisante pour contrebalancer la puissance de marché de la nouvelle compagnie.
Par ailleurs, Korean Air avait affirmé qu’une des motivations qui avait conduit à l’acquisition d’Asiana était la volonté de limiter les lourdes conséquences socio-économiques de la pandémie de coronavirus dans le secteur du transport aérien en Asie. Korean Air avait en effet procédé le 8 avril 2020 à la mise au chômage pour six mois d’environ 70% de ses employés en raison de la crise liée à la pandémie. Néanmoins, selon la Commission, il est peu probable que les deux compagnies perdent grandement en compétitivité si l’opération n’a pas lieu.
Korean Airlines n’a par ailleurs pas proposé d’engagements pour apaiser les craintes de la Commisssion à la suite de l’ouverture de la phase II de la procédure de concentration.
Les résultats de son enquête approfondie ont confirmé les doutes de la Commission et dès lors, le 17 mai 2023, elle a communiqués à Korean Airlines les griefs retenus à son encontre. Ceux-ci sont fondés sur le risque d’une restriction de la concurrence que causerait cette acquisition dans la fourniture de services de transport de passagers entre la Corée du Sud, la France, l’Allemagne et l’Italie ainsi que la distorsion de concurrence dans le domaine des services de transport de marchandises entre l’ensemble de l’Europe et la Corée du Sud.
Korean Air dispose désormais d’un délai de quatre semaines pour consulter le dossier et contester par écrit la position de la Commission. Une audience peut également être sollicitée. La compagnie dispose de la possibilité de présenter des engagements structurels (cession d’aéronefs, abandon de slots, etc.) ou comportementaux (limitation d’expansion commerciale) pour répondre aux préoccupations de la Commission.
La décision finale devrait intervenir le 3 août au plus tard.
Relevons que les procédures en phase II en matière de contrôle de concentrations demeurent limitées. Actuellement, sept projets de concentrations font l’objet d’une telle enquête approfondie dans les secteurs des télécommunications, des médias, des services de communications par satellite, etc.