Une nouvelle loi sur la gestion et le recouvrement des avoirs saisis oblige tous les acteurs, et notamment les établissements bancaires et prestataires de services financiers, à informer les autorités au plus tard pour le 1er mai 2023 de tous avoirs saisis entre leurs mains dans le cadre d’une procédure pénale, nationale ou étrangère.
Un nouveau bureau pour la gestion des avoirs saisis et confisqués
Ainsi, la loi du 22 juin 2022 sur la gestion et le recouvrement des avoirs saisis ou confisqués, entrée en vigueur le 5 juillet 2022, a institué un « Bureau de gestion des avoirs ». Ce Bureau a notamment pour mission la gestion de toutes les sommes - qu’il s’agisse de numéraire ou de soldes inscrits au crédit d’un compte, de créances ou d’actifs virtuels - saisis au cours d’une procédure pénale nationale ou étrangère, de même que la gestion d’autres biens saisis qui nécessitent pour leur conservation ou leur valorisation des actes de gestion. Les biens saisis sont conservés dans l’attente d’une décision de justice définitive ordonnant la confiscation, la destruction ou la restitution de ces biens.
De nouvelles missions pour la caisse de consignation
Concrètement, la gestion consiste à conserver les sommes d’argent ou les soldes inscrits en compte auprès de la Caisse de consignation de l’Etat. Les actifs virtuels sont conservés dans un portefeuille ouvert au nom de la Caisse de consignation. Les créances sont conservées ou encaissées, par subrogation de l’Etat dans les droits des créanciers. Les autres biens saisis sont soit conservés en nature, soit aliénés afin d’y substituer une somme d’argent.
Si la conservation d’un bien saisi est susceptible d’entraîner une dépréciation importante de ce bien, toute personne intéressée peut former une requête auprès des autorités compétentes en vue de l’aliénation de ce bien. En cas de décision favorable, le Bureau de gestion des avoirs exécute la décision d’aliénation. Le produit de l’aliénation est substitué au bien en question et conservé par le Bureau de gestion des avoirs.
Un deuxième bureau pour détecter et recouvrer le produit du crime
La loi du 22 juin 2022 institue en outre un « Bureau de recouvrement des avoirs » ayant pour mission de détecter et de dépister des biens susceptibles d’être saisis ou confisqués dans le cadre d’une coopération internationale ou d’une enquête ou d’une instruction judiciaire nationale, de même que d’assister le Parquet dans l’exécution des jugements de condamnation. La loi instaure une nouvelle procédure d’enquête « postsentencielle », donc qui intervient après la condamnation de l’accusé. Le Bureau peut être chargé par le Parquet de rechercher et de recouvrir des biens d’une personne condamnée pouvant servir d’assiette pour l’exécution d’une confiscation patrimoniale. Contrairement aux procédures antérieures, la recherche et la confiscation du produit de l’infraction ou de valeurs équivalentes peut se poursuivre après le procès principal.
Les professionnels obligés à la coopération
Dans l’exercice de ses missions, le Bureau peut demander des informations sur le patrimoine du condamné auprès des professionnels qui sont tenus de répondre à toutes les questions posées sans être autorisés à faire état de cette demande à leur client, sous peine d’une amende de 1 250 à 1 250 000 euros. Le Bureau de recouvrement des avoirs peut aussi échanger des informations avec ses homologues étrangers.
Si les informations révèlent l’existence d’avoirs appartenant au condamné, le Bureau de recouvrement des avoirs peut charger les professionnels de mettre ces avoirs à sa disposition ou de les transférer à la Caisse de consignation. En cas d’actifs virtuels, le Bureau de recouvrement ordonne le transfert des actifs virtuels vers un portefeuille ouvert au nom de la Caisse de consignation. Le Bureau de gestion des avoirs est chargé de gérer ces biens comme décrit ci-dessus.
Une déclaration à faire avant le 1er mai 2023
Conformément à l'article 18 de la loi du 22 juin 2022, toute entité détenant des fonds, des créances ou des actifs virtuels qui ont été saisis dans le cadre d'une procédure pénale nationale ou étrangère avant l'entrée en vigueur de cette loi (c'est-à-dire le 5 juillet 2022) est tenue d'informer le Bureau de gestion des avoirs de ces actifs et de suivre les instructions qu'elle recevra concernant le transfert de ces actifs. Pour le cas où les avoirs ou les biens saisis sont gagés, une analyse au cas par cas s’impose.
Cette information doit impérativement intervenir avant le 1er mai 2023.
Jean-Luc Putz
Partner
Business Crime