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Après avoir sous-traité (« externalisé ») les activités de restauration à un traiteur, une école supérieure a décidé d'assurer à nouveau, elle-même, la préparation des repas pour ses étudiants et membres du personnel. Dans le cadre de cette « internalisation » des activités de restauration, on s'interroge toutefois sur la notion de « transfert d'entreprise ».
Selon l'article 6 de la CCT belge n°32bis, un « transfert d'entreprise » est « le transfert d'une entité économique maintenant son identité, entendue comme un ensemble organisé de moyens, en vue de la poursuite d'une activité économique, que celle-ci soit essentielle ou accessoire ». On peut avoir affaire à un transfert d'entreprise dans un certain nombre de situations différentes, par exemple la vente d'une division d'entreprise, externalisation d'une activité, situation dans laquelle un nouveau prestataire de services poursuit une activité qui était déjà auparavant sous-traitée, .... Dans le cas d'un transfert d'entreprise, le cessionnaire doit, en principe, reprendre les travailleurs concernés et respecter les conditions d'emploi existantes (sous réserve de quelques exceptions que nous n'aborderons pas).
Dans un arrêt du 7 mai 2012, la Cour de cassation a eu à connaître d'une affaire dans laquelle le pouvoir organisateur d'une école supérieure avait, dans un premier temps, externalisé ses activités de restauration. Dans ce cadre, l'école supérieure avait mis les locaux et le matériel de cuisine nécessaires à la disposition du traiteur. Après la cessation du contrat avec le traiteur, l'école supérieure avait commencé à exploiter elle-même, en gestion propre, le restaurant, utilisant à cet effet les mêmes locaux et matériel de cuisine. Un des travailleurs du traiteur n'avait manifestement pas été repris par l'école supérieure mais s'était vu licencier, ce qui l'avait amené à réclamer une indemnité compensatoire de préavis. C'est dans ce contexte que se posa la question de savoir s'il y avait eu transfert d'entreprise ou non.
La Cour du travail de Bruxelles avait jugé qu'aucun transfert d'entreprise n'avait eu lieu et avait condamné le traiteur au payement d'une indemnité compensatoire de préavis au travailleur concerné. La Cour du travail avait à cet égard estimé que, si un nouveau traiteur avait poursuivi les activités de restauration, le transfert des locaux et du matériel de cuisine nécessaires, mis à disposition par l'école supérieure, aurait été suffisant pour pouvoir parler d'un transfert d'une entité économique. La Cour du travail considéra toutefois qu'en l'espèce, aucun « transfert » des locaux et du matériel mis à disposition par l'école supérieure n'avait eu lieu. En effet, après avoir pris la décision d'internaliser les activités, l'école supérieure n'avait plus accordé le droit d'utiliser ces locaux et matériel. Dans ce cas, il n'y avait pas eu, selon la Cour du travail, de cession de biens matériels. Dès lors qu'il n'y avait pas eu non plus de cession de personnel, la Cour du travail avait décidé qu'il ne s'agissait pas d'un «transfert d'entreprise ».
Le 7 mai 2012, la Cour de cassation a cependant adopté une position différente. Selon la Cour de cassation, il y a transfert d'entreprise lorsqu'un donneur d'ordre a sous-traité des services à une autre entreprise, laquelle utilise à cet effet des biens matériels essentiels, et qu'il décide par la suite d'exécuter lui-même le service en continuant à utiliser les biens matériels mis à disposition. On peut dès lors parler de transfert d'entreprise dans le cadre d'une internalisation, avec l'obligation corrélative de reprendre les travailleurs concernés.