24/04/12

Le point sur le droit applicable aux gages sur comptes titres et espèces

La transposition de la directive Collateral en droit belge n’avait pas répondu de manière satisfaisante aux besoins du marché. Seuls les gages sur instruments financiers inscrits en compte étaient pris en compte, à l’exclusion des gages sur espèces. Le règlement Rome I a fort heureusement remis les pendules à l’heure.

Les financements bancaires s’accompagnent généralement de la mise en place d’un assortiment de sûretés. Parmi celles-ci figure régulièrement le gage sur un compte d’instruments financiers. Ces comptes sont, dans la plupart des cas, liés à un compte « cash » destiné à récolter les espèces découlant des titres (dividendes, intérêts, etc). Dans le cadre de la mise sur pied de la sûreté, les banques souhaitent dans la majorité des cas que le gage couvre à la fois les titres et les espèces.

Les règles applicables au gage sur titres et gage sur espèces ne sont toutefois pas identiques. Cela est principalement dû au fait que le contrat de gage sur espèces est considéré, en droit belge, comme un gage sur créance (le titulaire du compte détenant une créance sur sa banque). Il en va de même pour les dispositions de droit international privé permettant de déterminer le droit applicable à la convention de gage sur titres ou sur espèces et aux droits et obligations qui en découlent, lorsque survient un élément d’extranéité dans la relation (compte ouvert à l’étranger, débiteur-gagiste étranger, etc).Ainsi, la loi relative aux sûretés financières précise-t-elle que le droit applicable à la convention de gage sur titres est le droit de l’état dans lequel le compte (dit « pertinent ») est tenu. Lorsque ce compte est tenu en Belgique (ce qui est relativement fréquent, compte tenu notamment de la présence d’acteurs tels qu’Euroclear ou Bank of New York Mellon à Bruxelles), le gage sur titres sera soumis au droit belge. Il convient toutefois d’être vigilant lorsque le compte est ouvert auprès d’une succursale étrangère d’un établissement belge, auquel cas il est probable que ce droit étranger soit d’application.

Le gage sur espèces relève, comme on l’a dit, du gage sur créances. La question du droit applicable à ce type de gage n’est pas été traité par la loi relative aux sûretés financières. Jusqu’en 2008, il convenait de se référer au code de droit international privé, qui renvoie à la loi du débiteur gagiste.
Par conséquent, si ce débiteur n’était pas belge, le gage sur un compte espèces tenu auprès d’un établissement belge était soumis à un droit étranger (et parfois ‘exotique’). Il s’en suivait également que les gages sur titres et espèces étaient soumis à des droits différents, ce qui n’était pas sans créer d’importants obstacles à la mise sur pied de ce type de sûreté mais également à son exécution.

Fort heureusement, à l’occasion de l’adoption du règlement de Rome I (venu succéder à la Convention de Rome) en 2008, la disposition relative aux cessions de créances a été complétée afin d’inclure dans son champ d’application les gages sur créances. Le règlement de Rome I renvoie ainsi, pour la majorité des aspects du gage, à la loi qui régit la créance. Par l’effet de la primauté du droit européen, cette disposition s’applique, nonobstant la disposition du code de droit international privé, lorsque l’élément d’extranéité relève de l’Union européenne.

En conséquence, sur base de la loi sur les sûretés financières et du règlement de Rome I, les gages sur titres et les gages sur espèces sont soumis au droit belge lorsque les comptes sont tenus auprès d’établissements belges. Cette conclusion doit toutefois être tempérée lorsque le débiteur gagiste n’est pas européen.

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