01/11/11

Hoogste Indische Gerechtsinstantie – Milieurecht – Grondwettelijke rechten

Il nous est enseigné que parmi les sources du droit belge, peut figurer la jurisprudence rendue par les juridictions étrangères.

La Cour Suprême indienne a prononcé le 5 juillet 2011, un jugement dont les considérants ont une portée qui dépasse les frontières de son pays. Cette jurisprudence a vocation à être appliquée par d’autres juridictions.


Résumons le litige :

Pour éradiquer l’insurrection maoïste – Mouvement naxalite1 , présent notamment dans l’Etat de Chattisgarh (centre de l’Inde) – le gouvernement indien, par l’action de son Ministre de l’Intérieur, décide de déployer 6.500 suppléants de police (« special police officers ») et de faire appel à la milice « Salwa Judum » (« chasseurs de paix »), ces forces de l’ordre s’ajoutant à la présence policière régulière. Cette opération est baptisée « Green Hunt » (« traque verte »).

Cette politique sécuritaire est le corollaire nécessaire de la croissance économique du pays, selon les autorités indienne.


Faut-il préciser que la vaste région concernée par cette politique sécuritaire recèle un potentiel minier immense, convoitise des groupes internationaux et indiens. La Cour épingle, à ce titre, la corruption existante entre les autorités et la « mafia » des mines, ce qui détruit l’autorité morale de l’Etat (considérant n°13).

En 2007, suite à des faits d’une rare violence contre la population civile perpétrés par les milices, un recours est initié par Nandini Sundar, jeune directrice du département de sociologie de la Delhi School of Economics et Doyenne de la faculté de l’Université de Delhi contre l’Etat de Chattisgarh.

Dans son jugement de ce 5 juillet 2011, la Cour Suprême a ordonné contre toute attente, l’interdiction de la milice Salwa Judum et des suppléants de police, en profitant de cette occasion pour dénoncer les véritables causes à l’origine de cette guerre civile et économique.

Cette décision, rappelant à tous et plus particulièrement aux responsables politiques les valeurs constitutionnelles, devient, lorsqu’elle aborde les droits environnementaux, un véritable réquisitoire contre le modèle néolibéral de développement adopté par le pays. La croissance à deux chiffres peut-elle justifier la méconnaissance des droits les plus fondamentaux ?

En effet, sur le plan écologique, la Cour Suprême considère que le Modèle économique encourage les « formes prédatrices du capitalisme » et se nourrit « du pillage et du vol des ressources naturelles ».


La Cour ajoute que :

« Predatory forms of capitalism, supported and promoted by the State in direct contravention of constitutional norms and values, often take deep roots around the extractive industries. In India too, we find a great frequency of occurrence of more volatile incidents of social unrest, historically, and in the present, in resource rich regions, which paradoxically also suffer from low levels of human development.

The argument that such a development paradigm is necessary, and its consequences inevitable, is untenable. The constitution itself, in no uncertain terms, demands that the State shall strive, incessantly and consistently, to promote fraternity amongst all citizens such that dignity of every citizen is protected, nourished and promoted.

The Directive Principles, though not justiciable, nevertheless ″fundamental in the governance of the Country″, direct the State to utilize the material resources of the community for the common good of all, and not just of the rich and the powerful without any consideration of the human suffering that extraction of such resources impose on those who are sought to be dispossessed and disempowered. Complete justice – social, economic and political - , is what our Constitution promises to each and every citizen. Such a promise, even in its weakest form and content, cannot condone policies that turn a blind eye to deliberate infliction of misery on large segments of our population.

Policies of rapid exploitation of resources by the private sector, without credible commitments to equitable distribution of benefits and costs, and environmental sustainability, are necessarily violative of principles that are ″fundamental to governance”, and when such a violation occurs on a large scale, they necessarily also eviscerate the promise of equality before law, and equal protection of the laws »


Cette prédation des ressources naturelles engendre « la grande misère et le désespoir » des populations et aboutit à « un régime de violations flagrantes des droits humains ».


L’article 23 de la Constitution belge qui prescrit que « Chacun a le droit de mener une vie conforme à la dignité » et que ce droit comprend le doit à la protection d’un environnement sain, ne trouve-t-il pas un éclairage supplémentaire dans la décision de ce 5 juillet 2011 de la Cour Suprême indienne ?

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1.1 Mouvement naxalite né à la fin des années 1960 à la suite de la révolte tribale des Naxalbari, tribu du centre de l'Inde.

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