Lorsqu'une société effectue des dépenses visées à l'article 57 du code des impôts sur les revenus (ex : commissions, ristournes, honoraires, rémunérations (y compris les avantages en nature), indemnités forfaitaires allouées aux membres du personnel) et que celles-ci ne sont pas justifiées par la production de fiches individuelles et d'un relevé récapitulatif, une cotisation distincte de 309% sera appliquée. Cette règle s'applique également aux bénéfices dissimulés qui ne se retrouvent pas dans le patrimoine de la société.
Dès lors, si une société s'abstient d'établir une fiche pour une rémunération octroyée de 100 EUR, l'administration appliquera une cotisation spéciale de 309 %. La société devra donc payée 309 EUR au trésor et ce quelle que soit la situation fiscale de la société (pertes ou bénéfices).
Cette règle n'est pas nouvelle. L'objectif de cette règle est dissuasif vu les montants importants qui peuvent être déboursés par une société. Toutefois, en pratique les contrôleurs de l'administration fiscale ne l'appliquaient pas systématiquement. En effet, en l'absence de mauvaise foi, il arrivait souvent que les contrôleurs de l'administration fiscale permettaient de reprendre ces montants soit en dépenses non admises ou encore de les réintégrer dans le résultat de la société lorsque par exemple un bénéfice dissimulé avait été constaté.
Il est évident que cette tolérance est et était « contra legem », toutefois elle traduit le malaise compréhensible et humain de certains inspecteurs à appliquer une sanction aussi importante dans un pays où le niveau d'impôt est déjà très élevé.
Cette pratique est désormais finie !
Dans une instruction remise à tous les services de taxation en juillet 2011, l'administration impose à ses agents d'appliquer systématiquement la cotisation spéciale sur commissions secrètes1 et ce dans tous les cas de figure. En outre, cette application systématique fera l'objet d'un contrôle interne, le contrôleur sera donc contrôlé.
Cette instruction cite différents cas de figure où cette cotisation trouvera ou non à s'appliquer:
1) L'avantage en nature est repris dans la déclaration du bénéficiaire mais pas sur le relevé 325. Dans ce cas, la cotisation spéciale ne s'appliquera pas.
2) L'avantage en nature est bien déclaré à l'IPP mais le montant n'est pas correct. Dans ce cas, la cotisation spéciale s'appliquera pour le montant non déclaré.
3) Lorsque l'avantage est repris en produit en compte de résultat de la société, la cotisation spéciale ne s'appliquera pas en raison de la facturationla société.
4) Si l'avantage est repris que partiellement en produit, le solde se verra appliquer la cotisation spéciale.
En pratique, on peut penser que cette mesure devrait être a priori rarement appliquée. Toutes les sociétés pensent bien entendu déclarer correctement les rémunérations octroyées aux membres de son personnel ou à leurs relations d'affaire. Mais est-ce bien toujours le cas ?
Une circulaire du 1er décembre 20102 reprend quelques cas qui ne sont pas nécessairement d'école. On y cite notamment, l'avantage de toute nature suite à un prêt sans intérêts accordé par une société à un membre du personnel ou encore la partie du loyer et des avantages locatifs requalifiée dans le chef du dirigeant d'entreprise comme rémunération. On y trouve également, les libéralités au sujet desquelles les noms et adresse des bénéficiaires et le motif de paiement ne sont pas précisés. L'administration vise ici les allocations rémunérant des services rendus qui sont portés parmi les frais professionnels sous l'appellation « libéralités », en vue de les soustraire à l'IPP dans le chef des bénéficiaires.
L'administration ratisse donc large, il sera important pour les sociétés de vérifier si toutes les sommes payées susceptibles de constituer un avantage dans de chef des bénéficiaires ont bien été déclarées. Pour autant qu'il y ait une utilisation privée, l'usage d'un GSM ou d'un ordinateur portable de société a-t-il bien été déclaré comme il se doit ? Les frais propres octroyés aux employés sont-ils évalués correctement ? Les frais de voyage « incentives » constituent-ils des avantages taxables ? Il s'agit là de questions factuelles qui si elles sont appréciées de façon différente par l'administration fiscale, risquent de coûter très cher aux sociétés. A ce propos, il utile de rappeler que pour certaines questions, une demande de ruling peut être introduite auprès du service des Décisions Anticipées (SDA) ce qui assurera une sécurité juridique quant au traitement fiscal applicable à certaines sommes payées.
Lorsque l'administration entend appliquer la cotisation spéciale, le contribuable pourra toujours y échapper en démontrant que ces avantages ont été déclarés par le bénéficiaire dans une déclaration régulièrement introduite. Apporter cette contre preuve peut être difficile car une société n'a pas forcément accès aux déclarations des bénéficiaires. C'est pourquoi, la circulaire précitée prévoit que si le contribuable est de bonne foi, l'administration est invitée à collaborer en vue de retrouver la déclaration du bénéficiaire concerné, notamment dans le cas où les relations entre la société et le bénéficiaire se seraient détériorées.
Si par malchance, l'administration fiscale applique la cotisation spéciale pour commission secrète, celle-ci constituera une dépense déductible dans le chef de la société. Ce qui constitue unemaigre consolation face au montant exorbitant qui pourrait être payé par une société.
En conclusion, chaque société devra bien analyser ses dépenses et faire les fiches et relevés si nécessaires. Au besoin, en cas de doute ou de discussion possible avec l'administration fiscale, une demande de ruling pourra toujours être introduite auprès du SDA.
Une société avertie en vaut 309 ...
1 A noter qu’elle impose désormais également une application stricte des accroissements d’impôt en cas de déclarations incomplètes ou inexactes.
2 Circulaire n° Ci.RH.421/605.074 (AFER N° 71/2010)