03/08/11

L’exploitation patrimoniale d’un nom déjà reconu dans le domaine comercial peut-ele être interdite ?

La saga Fiorucci touche à sa fin. Dans un arrêt prononcé le 5 juillet 2011 (aff. C-263/09 P), la CJUE a, en effet, tranché : la notion de « droit au nom » susceptible d’être invoquée par une personne pour s’opposer à l’enregistrement de son nom en tant que marque communautaire ne se limite pas à protéger un aspect d’attribut de la personnalité mais peut également servir à protéger une exploitation commerciale de ce nom.

Rappelons que le litige ayant donné lieu à cet arrêt opposait le célèbre styliste italien Elio Fiorucci, fondateur de la société Fiorucci SpA, à l’entreprise japonaise Edwin Co Ltd à laquelle Elio Fiorucci avait cédé l’intégralité du patrimoine créatif de Fiorucci SpA au début des années 90. Le point de friction résultait d’une demande d’enregistrement de la marque verbale ELIO FIORUCCI déposée par l’entreprise Edwin auprès de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (l’OHMI) pour une série de biens de consommation (parfums, vêtements, etc.).

Mr Fiorucci, s’appuyant sur le droit italien et sur le règlement européen n° 40/94 sur la marque communautaire, qui prévoit qu’une marquee communautaire est déclarée nulle si son usage peut être interdit en vertu d’un autre droit antérieur comme un droit au nom protégé par un droit national, contestait cet enregistrement en faisant valoir qu’en raison de sa notoriété, son nom ne pouvait être enregistré comme marque qu’avec son consentement.

Le Tribunal de l’Union (ci-après, « le TUE »), saisi d’un recours introduit par Mr Elio Fiorucci suite à l’enregistrement de la marque a ensuite confirmé, dans un arrêt de 2009 (aff. T-165/06), que l’OHMI pouvait prononcer la nullité d’une marque communautaire lorsque son usage entrait en conflit avec, notamment, un droit antérieur au nom protégé par la legislation nationale et a annulé la décision d’enregistrement estimant que l’OHMI avait, en l’espèce, écarté à tort l’application du droit italien.

L’entreprise Edwin a alors formé un pourvoi devant la CJUE, qui a donné lieu à l’arrêt du 5 juillet 2011. En substance, Edwin soutenait que le règlement sur la marque communautaire ne visait le droit au nom qu’en tant qu’attribut de la personnalité et ne couvrait dès lors pas le nom d’Elio Fiorucci qui avait acquis sa notoriété dans le cadre d’une exploitation commerciale. Ainsi, l’exploitation patrimoniale d’un nom déjà reconnu dans le domaine commercial ne pourrait être interdite.

Toutefois, cette argumentation n’a pas emporté la conviction de la CJUE. Cette dernière, en se référant au libellé et à la structure du règlement sur la marque communautaire, constate que la notion de « droit au nom » ne peut être limitée à un aspect d’attribut de la personnalité mais peut également recouvrir l’exploitation patrimoniale du nom. Elle en conclut que le titulaire d’un nom notoire est bien fondé à s’opposer à l’utilisation de ce nom en tant que marque lorsqu’il n’a pas consenti à son enregistrement et ce, également lorsque le droit au nom invoqué vise à protéger les aspects économiques du nom.

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