03/11/10

Het Hof van Justitie van de Europese Unie bepaalt het begrip van “overheidsopdracht van werken”

Marché public de travaux – notion – intérêt économique du pouvoir adjudicateur – obligation de réaliser les travaux – distinction entre marchés et concessions de travaux publics

Qu’entend-on sous la notion de « marché public de travaux » ? Tel pourrait résumer les différentes questions – neuf ! – posées à la CJUE par les juges allemands.

L’affaire opposait une société allemande, Helmut Müller, à l’administration fédérale chargée des affaires immobilières au sujet de la vente par cette dernière d’un terrain sur lequel l’acquéreur devait exécuter des travaux d’aménagement répondant à des objectifs de développement urbanistique définis par la Commune. Le terrain est vendu à la société GSSI. La société Helmut Müller intenta alors un recours contre ce contrat de vente : il considérait que GSSI avait obtenu un marché public de travaux, de sorte que la réglementation y afférente aurait dû être respectée.

Dans les première, deuxième et cinquième questions, les juges allemands demandent à la CJUE si un marché public de travaux requiert que « les travaux soient exécutés matériellement ou physiquement pour le pouvoir adjudicateur et dans l’intérêt économique direct de celui-ci » ou si le fait que les travaux satisferont « un objectif public défini par le pouvoir adjudicateur », tel que le développement urbanistique d’une partie de la Commune, suffit ?

Dans un premier temps, la CJUE énonce que « la vente à une entreprise, par une autorité publique, d’un terrain ou comprenant des bâtiments déjà construits ne constitue pas un marché public de travaux. En effet, d’une part, dans le cadre d’un tel marché, l’autorité publique doit assumer la position d’acquéreur et non de vendeur. D’autre part, l’objet d’un tel marché doit consister dans l’exécution de travaux. »

La CJUE précise ensuite que « le simple exercice de compétences de régulation en matière d’urbanisme, visant à la réalisation de l’intérêt général, n’a pas pour objet la réception d’une prestation contractuelle ni la satisfaction de l’intérêt économique direct du pouvoir adjudicateur ». Pour rappel, un marché public est un contrat à titre onéreux, ce qui implique une prestation moyennant une contrepartie. Or, la condition du « titre onéreux » n’est pas satisfaite lorsque les travaux envisagés visent à satisfaire un objectif public d’intérêt général dont il incombe au pouvoir adjudicateur d’assurer le respect, tel que le développement ou la cohérence urbanistique d’une partie d’une Commune. Autrement dit, le simple exercice de compétences de régulation en matière d’urbanisme, visant à la réalisation de l’intérêt général, n’a pas pour objet la réception de la prestation contractuelle ni la satisfaction de l’intérêt économique direct du pouvoir adjudicateur (points 57 et 58). Pour qu’il puisse être admis qu’un pouvoir adjudicateur ait défini ses besoins, il faut que ce dernier ait pris des mesures afin de déterminer les caractéristiques de l’ouvrage ou, à tout le moins, d’exercer une influence déterminante sur la conception de celui-ci (point 67).

Dans leurs troisième, quatrième et cinquième questions, les juges allemands interrogent la CJUE sur la question de savoir si l’entrepreneur est obligé de réaliser directement ou indirectement les travaux et, dans l’affirmative, si une telle obligation pourrait être réclamée en justice. La CJUE va rappeler que la notion de marchés publics de travaux « exige que l’adjudicataire assume directement ou indirectement l’obligation de réaliser les travaux » et que l’exécution de cette obligation pourrait, le cas échéant, être réclamée en justice. Il est dès lors indifférent que l’adjudicataire exécute les travaux par ses propres moyens ou en ayant recours à la sous-traitance (point 61).

Les juges allemands demandent également, dans les sixième et septième questions, si le cas d’espèce pourrait constituer une concession de travaux publics. Pour rappel, une concession de travaux publics est un « contrat présentant les mêmes caractéristiques qu’un marché public de travaux, à l’exception du fait que la contrepartie des travaux consiste soit uniquement dans le droit d’exploiter l’ouvrage, soit dans ce droit assorti d’un prix ». Sur ce point, la CJUE précise les contours de la notion de « concession de travaux publics ». Elle rappelle que, pour qu’il y ait concession, il faut que le propriétaire du terrain soit l’autorité publique qui attribue la concession. « Aussi longtemps qu’un opérateur jouit du droit d’exploiter le terrain dont il est le propriétaire, la possibilité qu’une autorité publique attribue une concession portant sur cette exploitation est, en principe, exclue. » En l’espèce, l’acheteur devient le propriétaire du terrain, ce qui exclut donc la possibilité d’une concession de travaux publics.

En outre, la Cour va rappeler que « l’essence de la concession réside dans le fait que le concessionnaire supporte lui-même le risque économique principal ou, en tout cas substantiel, lié à l’exploitation ». En l’espèce, le risque de l’acheteur réside dans le fait qu’il ne sait pas si la Commune va accepter ses plans. « Dans une telle situation, le risque serait lié aux compétences de régulation du pouvoir adjudicateur en matière d’urbanisme et non à la relation contractuelle découlant de la concession. Par conséquent, le risque ne serait pas lié à l’exploitation. » En ce qui concerne la durée des concessions, la Cour rappelle que l’attribution d’une concession sans limitation de durée serait contraire à l’ordre juridique de l’Union.

Enfin, les juges allemands demandent s’il faut considérer comme un tout, d’un point de vue juridique, la vente du terrain et l’attribution ultérieure éventuelle d’un marché public portant sur ce terrain. La Cour considère qu’ « il est judicieux de ne pas exclure d’emblée l’application de [la réglementation relative aux marchés publics] à une procédure d’attribution en deux phases, caractérisée par la vente d’un terrain qui fera ultérieurement l’objet d’un marché de travaux, en considérant ces opérations comme un tout ». Cependant, ce sont les circonstances propres à la cause qui devront confirmer l’existence des présupposés d’une telle application (points 82 et 83).

En conclusion, sur la base des réponses apportées par la Cour, il appert que l’administration allemande pouvait vendre son terrain et y envisager ultérieurement des travaux d’aménagement sans respecter la directive européenne sur la passation des marchés publics. Mais l’intérêt de cet arrêt réside surtout dans le fait que la Cour en a profité pour davantage préciser les notions de « marché public de travaux » et de « concession de travaux publics ».

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