30/10/10

Reorganisatieplannen op maat ?

Nous vous avions déjà évoqué la possibilité de prévoir dans le plan de réorganisation un traitement différencié pour diverses catégorie de créanciers pour autant que cette différence de traitement soit raisonnablement justifiée.
Deux décisions récentes viennent confirmer ce principe et démontrent que la notion de « justification raisonnable » est une notion dont les critères d’appréciation sont relativement larges.

Le Tribunal de commerce de Liège [1] , dont la décision a ensuite été confirmé par la Cour d’appel, a en effet homologué un plan de réorganisation qui opérait une distinction entre les fournisseurs incontournables, les autres fournisseurs, les bailleurs de fonds et les créanciers institutionnels en soulignant que « Le redressement d'une entreprise passe par la nécessaire différenciation de traitement des créanciers (...).

Au demeurant, l'hypothèse du redressement du débiteur sera en tout état de cause de nature à permettre au fisc de percevoir ensuite l'impôt auprès de son contribuable qui aura eu la possibilité de redevenir un opérateur économique normal.

Le traitement différencié n'est donc pas discriminatoire et repose sur des critères objectifs, à savoir le redressement de l'entreprise ».

Le Cour souligne que « le plan, qui vise à assurer le redressement de l’entreprise pour l’avenir, ne crée aucune distinction arbitraire entre les bailleurs de fonds, sur lesquels l’entreprise doit pouvoir encore compter pour l’obtention de nouveaux crédits, et l’appelant qui n’a pas cette vocation »[2] .

De même, le Tribunal de commerce de Liège a homologué un plan de réorganisation qui prévoyait six catégories de créanciers différentes :
- les bailleurs de fonds (…) ;
- les créanciers sursitaires extraordinaires(…) ;
- les créanciers dont le fait générateur de la créance est antérieur au 1er février 2005 (…) ;
- les créanciers actionnaires ou liés à l’actionnaire (…) ;
- les créanciers dont les droits sont contestés avant l’ouverture de la procédure et avec lesquels la société n’entretient et ne pourra plus entretenir de relation d’affaires (…) ;
- tous les autres créanciers ordinaires non visés aux catégories ci-dessus.

Le tribunal [3] a ainsi jugé qu’« en prévoyant à l’article 55 LCE que le tribunal n’a plus qu’un pouvoir d’homologation du plan et non un pouvoir d’approbation, comme le prévoyait la loi du 17 juillet 1997, le législateur a clairement entendu assurer la prépondérance de la décision de l’assemblée des créanciers en amenant au rang du pouvoir marginal le pouvoir du tribunal.

Par ailleurs, l’article 49 LCE autorise le principe de la discrimination par la création de catégories de créanciers puisqu’il énonce que le plan « peut prévoir (…) le règlement différencié de certaines catégories de créances, notamment en fonction de leur ampleur et de leur nature

Il se déduit de ce libellé que le choix de la date du fait générateur de la créance comme critère déterminant une catégorie de créanciers peut constituer – au même titre que l’ampleur ou la nature de la créance – un critère objectif (…)

De la même manière, le fait de favoriser certains créanciers sur lesquels le débiteur doit encore pouvoir compter, par rapport à d’autres (dont W. et W. qui ne sont plus depuis 2002 des partenaires de l’entreprise) qui n’ont pas cette vocation, ne crée aucune distinction arbitraire ( (…)

La décision de servir dans un délai assez éloigné et de façon très limitée, les créanciers avec lesquels elle s’est trouvée en litige avant l’introduction de la demande, et qui n’ont, de façon certaine, au vu du litige ainsi consommé in tempore non suspecto, pas vocation à participer au redressement envisagé, relève d’un choix stratégique parfaitement justifié reposant sur la seule volonté de maintenir la continuité. Ce choix ne peut dès lors être critiqué puisqu’il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les buts recherchés et les moyens utilisés. »

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[1] Comm. Liège, 8 décembre 2009, J.L.M.B, 2010/8, p.375.
[2] Liège, 7ème chambre, 24 juin 2010, inédit, R.G. 1947/2009.
[3] Comm. Liège, 8 septembre 2010, inédit, Requête n° B.2010/52 – RJ 10/07.

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