08/10/13

Publicité sur internet : le droit des pratiques commerciales au secours des titulaires de marques ?

Depuis quelques temps, le référencement payant de Google est devenu une épine dans le pied des titulaires de marques. D'autant que la jurisprudence récente de la Cour de Justice en matière d'Adwords ne leur a pas été favorable.

Les arrêts rendus dans l'affaire Google et dans l'affaire Interflora ont abouti à des décisions qui affaiblissent les titulaires de marques au profit des opérateurs économiques concurrents, en autorisant dans des conditions assez larges l'usage de mots clés de référencement correspondant à la marque d'un tiers.

Ces arrêts de la Cour, s'ils valident (sous certaines conditions) l'usage de mots clés correspondant à la marque d'un concurrent, sont également intéressants en ce qu'ils comportent une série de considérations qui font un lien plus ou moins explicite avec la réglementation des pratiques commerciales déloyales, et en particulier la directive 2006/114 sur la publicité trompeuse et la publicité comparative.

Un arrêt du 11 juillet 2013 pourrait constituer l'amorce d'une évolution dans la jurisprudence de la Cour de Justice.

Dans cet arrêt, la Cour se prononce sur l'enregistrement et l'usage d'un nom de domaine, ainsi que l'usage de metatags correspondant à la marque d'un concurrent.

Les metatags sont les mots clés introduits dans le code HTML d'une page web (pas directement visible par l'internaute) dans le but d'orienter le référencement de la page concernée par les moteurs de recherche. L'usage de la marque d'un concurrent dans les metatags est dès lors assez comparable à l'achat de mots clés similaires à une telle marque.

Dans son arrêt du 11 juillet dernier, la Cour indique que l'enregistrement d'un nom de domaine ne constitue pas une publicité au sens de la directive 2006/114, car, en l'absence de diffusion d'un contenu, on peut difficilement y voir une communication ayant pour but de promouvoir la vente de produits/services (point 43).

L'usage du nom de domaine peut, par contre, constituer une publicité, en fonction du contenu de la page web concernée (points 45-46).

L'usage de balises meta (metatags) correspondant aux marques et/ou aux noms de produits de concurrents constitue également une forme de publicité, même si les balises ne sont pas directement visibles par l'internaute, car elles permettent d'assurer un meilleur référencement en cas de requête à un moteur de recherches basée sur la marque concernée (points 52 à 54).

La Cour confirme donc ce qui semblait évident par une analyse des dispositions de la directive 2006/114 : l'usage d'outils visant à améliorer le référencement sur internet constitue une forme de publicité.

Le caractère trompeur de la publicité ne faisait pas partie des questions posées à la Cour et celle-ci ne tranche donc pas ce point. On peut le regretter, car l'analyse qu'en fera la Cour sera intéressante à lire en parallèle à sa jurisprudence Adwords fondée sur le droit des marques (la conciliation des deux n'étant pas nécessairement évidente).

Dans son arrêt du 11 juillet 2013, la Cour ne s'est pas davantage prononcée sur l'existence d'une publicité comparative, faute de question à cet égard.

Le débat ici sera particulièrement intéressant pour les titulaires de marques, car la notion de publicité comparative est définie d'une manière très large (la publicité est « comparative » dès qu'elle permet d'identifier le concurrent ou ses produits/services) et son caractère licite est soumis à des conditions cumulatives très strictes, qui sont très difficiles à rencontrer dans le cadre d'une campagne de référencement payant. Cette voie pourrait constituer un angle d'attaque plus favorable aux titulaires de marques.

La jurisprudence de la Cour de Justice semble évoluer dans cette direction, mais cela doit encore être confirmé dans le cadre d'affaires où les questions posées à la Cour seront plus explicitement dirigées en ce sens.

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