Dans le prolongement du « cadre temporaire » annoncé le 20 mars dernier et dans le contexte de la crise du COVID-19, la Commission Européenne (CE) vient d’adopter ce vendredi 8 mai 2020 un amendement destiné à permettre aux États Membres de fournir à leurs entreprises, sous certaines conditions, des capitaux et/ou un soutien sous forme de dette subordonnée.
Ce nouvel (et second) amendement vient compléter à la fois les mesures prises par la CE il y a quelques semaines avec l’adoption d’un « cadre temporaire » mais également les règles préexistantes en matière d’Aides d’État. En effet, la CE définit des critères sur base desquels les États Membres peuvent ensuite accorder des recapitalisations et des dettes subordonnées aux entreprises dans le besoin suite à la crise liée au COVID-19.
Les États Membres restent en outre libres de concevoir des mesures nationales conformes à des objectifs politiques supplémentaires, telles que l’encouragement des transformations « vertes » et « numériques » de leurs économies et/ou prévenir la fraude, l’évasion fiscale, etc.
Concernant les mesures qui permettent la recapitalisation par un soutien direct des Etats Membres, les nouvelles mesures comportent certaines conditions qui peuvent, de manière non-exhaustive, être résumées comme suit:
– Conditions de nécessité, d’adéquation et de taille de l’intervention :
L’aide à la recapitalisation ne peut être accordée que si aucune autre solution appropriée n’est disponible et qu’il est dans l’intérêt général d’intervenir. De plus, l’aide doit se limiter à permettre la viabilité de l’entreprise et ne doit pas aller au-delà du rétablissement de la structure du capital du bénéficiaire telle qu’elle était avant la pandémie de Covid-19;
– Conditions d’entrée de l’État dans le capital des sociétés et rémunération :
L’État Membre qui intervient dans le capital de certaines entreprises doit être suffisamment rémunéré pour les risques qu’il assume. Le mécanisme de rémunération doit inciter les bénéficiaires et/ou leurs propriétaires à racheter le plus rapidement possible les actions acquises par l’État Membre, afin de garantir le caractère temporaire de l’aide.
– Conditions de sortie de l’Etat Membre :
L’investissement doit aussi inclure une stratégie de sortie, notamment en ce qui concerne les grandes entreprises qui ont reçu d’un État Membre une aide importante à la recapitalisation. Par ailleurs, si au plus tard six ans après la recapitalisation via l’aide ainsi accordée aux sociétés cotées en bourse (jusqu’à sept ans pour les autres sociétés), la sortie de l’État Membre venait à être remise en question, un plan de restructuration du bénéficiaire devra être notifié à la CE.
– Conditions de gouvernance :
Pendant un certain temps, les entreprises bénéficiaires de l’Aide d’Etat ne peuvent ni payer de dividendes à leurs actionnaires, ni effectuer de rachats d’actions. La rémunération de la direction de ces entreprises est limitée, , et il également est interdit d’émettre des « bonus ». Les États Membres ne peuvent pas utiliser l’aide pour soutenir les activités économiques d’entreprises intégrées qui connaissaient déjà des difficultés économiques avant le 31 décembre 2019.
Enfin, les bénéficiaires, autres que les PME, ne sont en principe pas autorisés à acquérir une participation de plus de 10% chez leurs concurrents ou autres opérateurs du même secteur d’activité.
Ce nouvel amendement permet également aux États Membres d’accorder aux entreprises de la dette subordonnée à des conditions favorables mais sous certaines restrictions. L’on vise ici les titres de créance subordonnés aux créanciers principaux ordinaires en cas de procédure d’insolvabilité. La dette subordonnée ne peut en effet pas être convertie en capitaux propres tant que l’entreprise exerce une activité.
Le « cadre temporaire » et ses amendements doivent se lire avec les mesures récentes prises par la CE visant la protection des « actifs stratégiques » (Communication C (2020) 1981 de la CE du 25 mars 2020).
Le « cadre temporaire » ainsi modifié sera en place jusqu’à la fin décembre 2020.
A noter également : Les règles en matière d’Aides d’État, en particulier les lignes directrices concernant les Aides d’État dans les secteurs de l’environnement et de l’énergie, seront révisées d’ici 2021 à la lumière des objectifs politiques du « Green Deal » européen et viseront à soutenir une transition vers la neutralité climatique en 2050 socialement inclusive. Cela devrait aussi contribuer à une stratégie globale de relance de l’économie européenne prenant en compte les transitions vertes et numériques, conformément aux objectifs européens et nationaux.