08/12/10

L’arrêt Heineken : (quelles) conséquences pour la Belgique?

La Cour de justice des communautés européennes a dû se prononcer sur la question de savoir s'il était nécessaire, en cas de transfert d'entreprise que les travailleurs qui estimaient être transférés soient au service de l'entreprise transférée. Heineken avait en effet mis en place une construction au sein de laquelle tous les travailleurs étaient au service d'une société, l'employeur central, qui par la suite détachait son personnel vers d'autres sociétés du groupe, les filiales. Une de ces filiales effectuait des activités de "fourniture de repas” pour le personnel de Heineken à divers endroits. Lorsque ces activités de fourniture de repas ont été cédées à une autre société, Albron Catering SA, les travailleurs concernés ont signé un nouveau contrat de travail avec Albron Catering SA. Il a été mis fin aux contrats de travail avec l'employeur central de Heineken, à la date du transfert.

Monsieur Roest était un des travailleurs qui avait signé un nouveau contrat de travail avec Albron Catering SA et dont le contrat de travail auprès de Heineken avait été rompu. Au moment des faits, Monsieur Roest était depuis environ 20 ans au service de l‟employeur central de Heineken et était déjà à ce moment détaché auprès de la filiale qui effectuait des fournitures de repas.

Il estimait cependant qu'il s'agissait d'un transfert d'entreprise et que donc son contrat de travail avec Heineken avait été transféré de plein droit. Par conséquent, il pouvait revendiquer les conditions de rémunérations (plus avantageuses) dont il bénéficiait chez Heineken. e « kantonrechter » des Pays-Bas a fait droit à ses demandes, mais lorsqu‟Albron Catering SA fit appel de cette décision auprès de la « Gerechtshof » à Amsterdam, celle-ci a décidé de poser une question préjudicielle à la Cour de Justice.

Bien que Monsieur Roest n‟ait donc aucun contrat de travail avec la société transférée, celui-ci estimait cependant que son contrat de travail avait été transféré de plein droit à Albron Catering SA. La Cour lui a donné raison sur ce point et a affirmé qu'une relation contractuelle n‟était pas nécessaire. Lorsque, dans un groupe, il coexiste deux employeurs, l'employeur qui est responsable de l'activité économique de l'entité transférée – et donc des relations de travail avec les employés de cette unité - peut être le cédant, même si cet employeur n'a aucune relation contractuelle avec les travailleurs du groupe. Chez nos voisins du nord, les médias ont porté beaucoup d'attention à cette affaire parce qu„avec cet arrêt, la Cour a encore élargi l'application des règles de transfert d'entreprise.

Cet arrêt emporte-t-il des conséquences concrètes en Belgique ? Nous ne le pensons pas.

Tout d'abord, l'expérience acquise par notre pratique nous a appris qu'une telle structure d'entreprise est rare en Belgique. Ensuite, il ne faut pas perdre de vue le contexte spécifique dans lequel cet arrêt a été rendu. Monsieur Roest avait une relation de longue date avec la filiale de Heineken semblable au rapport qui pourrait exister s'il avait été directement engagé par la filiale. Il semble donc que la Cour ait, dans ce cas particulier, voulu éviter que les entreprises échappent à l'application de la directive en mettant en place une structure d'entreprise semblable à celle du groupe Heineken.

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