29/05/14

Fate of the public procurement concluded without call for competition

Marché public – Absence de mise en concurrence – Nullité du contrat – Pas d’indemnisation pour l’entreprise – Faute de l’entreprise

Dans un arrêt rendu le 28 décembre 2013, la Cour d’appel de Bruxelles a jugé qu’un marché public conclu sans mise en concurrence était nul, et de nullité absolue. Il convenait ensuite de régler le sort des parties au contrat.

La Cour d’appel n’a pas eu à se prononcer sur une éventuelle restitution de ce qui avait été payé par le pouvoir adjudicateur à son cocontractant, pour les prestations déjà exécutées.

Par contre, l’entreprise avait établi des factures pour les prestations contractuellement prévues mais non encore exécutées, dont elle demandait le paiement. La Cour d’appel juge que l’entreprise doit « subir les effets de la nullité de la convention ce qui lui interdit d’obtenir le paiement des factures pour des prestations qui n’ont pas été accomplies ».

A titre subsidiaire, l’entreprise postulait l’obtention d’une indemnisation pour le préjudice lié à la non-exécution des prestations contractuellement prévues (bénéfice espéré, éventuels frais engagés, …). La Cour rejette cette demande jugeant que la faute du pouvoir adjudicateur, qui consiste en la conclusion du contrat sans mise en concurrence préalable, n’est pas en lien causal avec ce dommage dès lors que sans cette faute, c’est-à-dire si une mise en concurrence avait été organisée, il n’est pas certain que cette entreprise aurait obtenu le contrat, ni qu’elle aurait pu « facturer les prestations litigieuses aux mêmes conditions et obtenir le même bénéfice escompté ». La Cour juge au contraire que cette entreprise a profité de la faute du pouvoir adjudicateur et qu’elle a elle-même commis une faute car elle aurait dû « s’inquiéter du respect de la réglementation ».

Cet arrêt rejoint un arrêt du 23 novembre 2011 rendu par la Cour d’appel de Bruxelles, et confirme que le cocontractant d’un pouvoir adjudicateur doit être attentif au respect, par le pouvoir adjudicateur, de la réglementation sur les marchés publics. Cela semble constituer une application du principe de bonne citoyenneté, dont les contours sont incertains.

En matière de contrats publics, cette jurisprudence suscite un certain nombre d’interrogations :

  • quelle attitude doit adopter l’entreprise qui constate le non-respect de la réglementation sur les marchés publics lorsqu’un pouvoir adjudicateur lui passe commande ? S’agissant d’une cause de nullité absolue, et à la lecture des arrêts susmentionnés de la Cour d’appel de Bruxelles, il semblerait juridiquement plus prudent de ne pas conclure un tel marché. Une telle prudence pourrait d’ailleurs s’imposer au regard des éventuelles implications pénales d’une telle jurisprudence.
  • l’entreprise doit-elle s’assurer que la réglementation a été entièrement respectée, ou son devoir de vigilance se limite-t-il aux violations « flagrantes », s’il en est ? A cet égard, il faut noter que dans les affaires jugées par la Cour d’appel de Bruxelles, le pouvoir adjudicateur n’avait pas organisé la moindre mise en concurrence.

Sources:
Bruxelles, 28 décembre 2013, J.T., 2014, 96 ; Bruxelles, 23 novembre 2011, M.C.P. 2013 (sommaire), liv. 1, 133
K. WAUTERS et TH. CAMBIER, « Illégalité de l’acte détachable : quels sont les effets une fois le contrat conclu ? », in Le temps et le droit. Hommage au Professeur Closset-Marchal, Bruylant, Bruxelles, 2013, pp. 607 s.
 

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