25/03/14

The Blomqvist v. Rolex decision of the CJEU: intervention by European customs authorities over goods purchased outside the EU…

La Cour de Justice de l’Union Européenne s'est récemment penchée sur la question de savoir si l'intervention des autorités douanières européennes sur base du Règlement du Conseil n° 1383/2003 (le "Règlement Douanier") s'étendait également aux marchandises de contrefaçon achetées en dehors du territoire de l'Union Européenne. L’affaire Martin Blomqvist v. Rolex SA fut transmise à la Cour par le Danemark en 2013.

En 2010, M Blomqvist, résidant au Danemark, a commandé, par l'intermédiaire d'un site internet chinois de vente en ligne, une montre décrite comme étant de la marque Rolex. Le colis fut intercepté par les autorités douanières lors de son arrivée au Danemark. Soupçonnant une contrefaçon de la montre originale de la marque Rolex et une violation des droits d'auteur sur le modèle concerné, les autorités douanières ont suspendu le dédouanement de la montre. Après avoir confirmé qu’il s’agissait effectivement d’une contrefaçon, Rolex a demandé le maintien de la suspension du dédouanement et a sollicité de M Blomqvist qu'il donne son accord pour que la montre soit détruite. Celui-ci, esetimant qu'il avait acheté légalement cette montre, s'est opposé à sa destruction.

M Blomqvist fut enjoint par le tribunal de commerce danois d'admettre la suspension du dédouanement ainsi que la destruction de la montre sans indemnisation. M Blomqvist a ensuite interjeté appel contre cette décision devant la Cour Suprême danoise. Pour l'application du Règlement Douanier, il faut d'une part, être en présence d'une violation du droit d'auteur ou d'un droit de marque protégé au Danemark et, d'autre part, que la violation alléguée ait eu lieu dans ce même Etat membre. Dès lors qu'il est établi que M Blomqvist a acheté sa montre pour son usage personnel et qu'il n'a pas méconnu les lois danoises sur le droit d'auteur et sur les marques, se pose la question de savoir si le vendeur a violé le droit d'auteur et le droit des marques au Danemark.

En matière de droits d'auteur et de droit des marques Européens, il y a atteinte au droit en question lorsqu'une marchandise de contrefaçon est utilisée dans la vie des affaires ou distribuée au public. Il n'était pas contesté que Rolex eût été en droit de faire valoir l'atteinte à ses droits si la montre avait été mise en vente par un commerçant établi au Danemark étant donné qu’à l'occasion d'une telle vente, intervenue à titre commercial, il aurait été fait usage de ses droits dans la vie des affaires. La question se posait alors de vérifier si Rolex pouvait prétendre à la même protection de ses droits lorsque la marchandise en cause avait été vendue à partir d’un site internet situé en dehors du territoire européen, territoire dans lequel cette protection ne trouve pas à s'appliquer. En effet, la simple accessibilité d'un site internet sur le territoire couvert par cette protection ne suffit pas pour conclure que les offres de vente affichées sur ce site sont destinées à des consommateurs situés sur ce territoire.

La Cour Suprême danoise a voulu savoir si les conditions de “distribution au public” d'après la Directive en matière de droits d’auteurs ou d'"usage dans la vie des affaires” d'après les Directive et Règlement en matière de marques sont remplies lorsqu’une entreprise conclut, via un site internet situé dans un pays tiers, un contrat de vente et d’expédition de la marchandise à un acheteur privé, dont l’adresse est connue du vendeur, dans l’État membre où la marchandise est protégée, qu’il perçoive le paiement de la marchandise et effectue l’expédition à l’acheteur à l’adresse convenue. Ou s’il est en outre nécessaire que les marchandises, préalablement à la vente, aient fait l’objet d’une offre de vente ou d’une publicité dirigée vers les consommateurs de l'Etat Membre où la marchandise est livrée ou présentée sur un site internet destiné aux consommateurs de cet Etat.

La CJUE fait référence a sa décision rendue dans l’affaire Philips (Affaires jointes C-446/09 et C-495/09), laquelle disposait que des marchandises peuvent être considérées comme étant des “marchandises de contrefaçons” conformément au Règlement Douanier lorsqu'il est prouvé qu'elles sont destinées à une mise en vente sur le territoire de l’Union Européenne. Une telle preuve est rapportée, notamment, lorsqu'il s'avère que lesdites marchandises ont fait l'objet d'une vente, d'une offre à la vente ou d'une publicité adressée à des consommateurs dans l'Union. Le titulaire d'un droit de propriété intellectuelle sur une marchandise vendue à une personne résidant sur le territoire de l'Union à partir d'un site internet de vente en ligne situé dans un pays tiers bénéficie, au moment où cette marchandise entre sur le territoire de cet Etat Membre, de la protection garantie à ce titulaire par le Règlement Douanier du seul fait de l'acquisition de ladite marchandise. Il n'est à cet effet pas nécessaire que, en outre, préalablement à la vente, la marchandise en cause ait fait l'objet d'une offre de vente ou d'une publicité s'adressant aux consommateurs de l'Union.

Il s’agit incontestablement d’une décision positive pour les titulaires de droits de propriété intellectuelle cherchant à faire valoir leurs droits à l’égard de marchandises de contrefaçon mises en vente en dehors du territoire de l’Union. La preuve d’une vente de marchandise de contrefaçon dans l’Union est suffisante pour démontrer une violation de droits de propriété intellectuelle et permet aux autorités douanières de saisir lesdites marchandises conformément au Règlement Douanier.

(Le Règlement Douanier fut remplacé en janvier 2014 par le nouveau Règlement n 608/2013.)

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