La Cour constitutionnelle a rejeté le recours en annulation introduit par l’Ordre des architectes contre la loi du 9 mai 2019. Celle-ci est relative à l’obligation d’assurance RC PRO des prestataires intellectuels du secteur de la construction.
Les obligations d’assurances RC dans le chef des acteurs de la construction ont pour rappel connu des récentes évolutions.
Avant 2017 : obligation d’assurance RC pour les architectes mais pas pour les entrepreneurs
Par son arrêt du 12 juillet 2007, la Cour constitutionnelle s’était prononcée sur l’assurance obligatoire de la responsabilité professionnelle de l’architecte prévue par la loi « Laruelle ».
La Cour avait alors jugé que : “En ce que les architectes sont le seul groupe professionnel du secteur de la construction à être légalement obligé d’assurer sa responsabilité professionnelle, cette responsabilité risque, en cas de condamnation in solidum, d’être, plus que celle des autres groupes professionnels, mise en œuvre, sans qu’existe pour ce faire une justification objective et raisonnable. Cette discrimination n’est toutefois pas la conséquence de l’obligation d’assurance imposée par la loi attaquée mais bien de l’absence, dans le droit applicable aux autres ‘parties intervenant dans l’acte de bâtir’, d’une obligation d’assurance comparable. Il ne peut y être remédié que par l’intervention du législateur”.
2017 : obligation d’assurance RC décennale pour les entrepreneurs et autres prestataires de la construction
La loi du 31 mai 2017 répond à l’arrêt précité de la Cour. Elle impose en effet une obligation d’assurance de la RC décennale :
- pour les entrepreneurs
- pour les architectes et
- autres prestataires
du secteur de la construction de travaux immobiliers.
2019 : obligation d’assurance RC (hors décennale) pour les professions dites intellectuelles
La loi du 9 mai 2019 a en effet instauré une obligation d’assurance uniforme RC professionnelle pour tous les prestataires de services de nature intellectuelle dans le secteur de la construction (hors la responsabilité décennale) mais elle n’a pas inclus les entrepreneurs.
Un recours a dès lors été introduit par l’Ordre des architectes contre cette loi compte tenu de la différence de traitement entre :
- les architectes, obligés par la loi de 2019 d’assurer leur responsabilité civile professionnelle (hors décennale) et
- les entrepreneurs, non concernés par cette obligation.
Loi de 2019 inconstitutionnelle ? La Cour a tranché.
Par son arrêt du 25 février 2021, la Cour constitutionnelle a jugé que les entrepreneurs et les titulaires de professions dites intellectuelles formaient des catégories comparables. Elle a cependant estimé que la différence de traitement entre :
- les entrepreneurs et
- les titulaires des professions dites intellectuelles
reposait « sur un critère de distinction objectif et pertinent ».
L’entrepreneur de travaux ne relève pas du champ d’application de la loi du 9 mai 2019. Cependant, cela ne signifie pas qu’il ne doit pas assurer sa responsabilité professionnelle. La Cour rappelle en effet la loi du 31 mai 2017. Celle-ci impose à l’entrepreneur l’obligation de souscrire une assurance couvrant sa responsabilité décennale (articles 1792 et 2270 de l’ancien Code civil). Dans cette optique, la situation actuelle de l’entrepreneur de travaux diffère fondamentalement de celle qui devait être appréciée par la Cour dans son arrêt précité du 12 juillet 2007.
En vertu de la législation telle qu’elle était applicable à l’époque, l’entrepreneur de travaux ne devait en effet pas assurer sa responsabilité civile professionnelle, contrairement à l’architecte. Ceci, selon la Cour, n’était pas raisonnablement justifié. Compte tenu de ce qui précède, la différence de traitement critiquée n’est, selon la Cour, pas dénuée de justification raisonnable.
En résumé
En résumé, la Cour constitutionnelle a considéré que l’obligation d’assurance des entrepreneurs restreinte à la RC décennale pour les seuls vices cachés du gros-œuvre fermé d’un logement n’est :
- pas discriminatoire et
- dès lors pas inconstitutionnelle.